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Le 4. novembre 2014 à 13h41

Six Fours cinéma et gastronomie Aux Six n'étoiles : To beef or not to beef !

Originale avant-première au Six n'étoiles où l'on fêtait une vedette inattendue : le bœuf dans le rôle du beefsteak pour un film documentaire de Franck Ribière : "Steak (r)évolution" !

Noémie, Erick, le maire et son adjointe, le réalisateur et sa femme et les producteurs locaux

Noémie, Erick, le maire et son adjointe, le réalisateur et sa femme et les producteurs locaux

Sur une idée commune et originale de Noémie Dumas; directrice du cinéma et Erick Carrière, propriétaire de la brasserie qui jouxte le cinéma, le producteur Franck Ribière est venu présenter son premier film en tant que réalisateur.
En effet, dans le cadre du mois du documentaire, ce film était d'autant bien venu qu'Erick, on le sait, est un adepte des circuits courts. C'est à dire qu'il a décidé de ne travailler qu'avec des producteurs des alentours qu'il avait d'ailleurs conviés pour cette soirée, ce film étant tout à fait approprié à ses préceptes et sa profession de foi.
Car Franck Ribière, fils et neveu d'éleveurs, a grandi au milieu des troupeaux et a eu envie de faire un tour du monde de la viande de veau et de bœuf pour voir ce que chacun en faisait, comment les bêtes étaient élevées et nourries, comment on en préparait la viande et se rendre compte sur le terrain de ce qu'on mangeait dans le monde entier.
Aventure de trois ans, périple de deux ans qu'il a fait avec sa femme et néanmoins productrice, Vérane Frédiani.

Un hommage à la filière


"J'aime manger, j'aime voyager, j'aime le cinéma... Je ne pouvais trouver mieux - nous dit-il en riant - mais plus sérieusement, je suis parti d'une histoire familiale. A tel point d'ailleurs que pendant le tournage, j'ai perdu mon père et mon oncle et j'ai eu un bébé !
Je suis parti du principe que la viande, on peut s'en passer. Il y a des végétariens qui ne s'en portent pas plus mal et d'ailleurs, s'il y en avait plus, il y aurait moins de mangeurs de viande, on tuerait moins d'animaux, le profit serait moins important et l'on élèverait mieux les bêtes.
Mais je voulais rendre hommage à la filière en faisant un film positif, festif avec comme but de trouver le meilleur steak du monde.
Etant très impliqué, pour la première fois j'ai décidé de réaliser le film moi-même en partant à l'aventure, avec ma femme, le boucher Yves-Marie le Bourdonnec qui est le fil rouge du film, avec bien sûr, quelques points de chute en France, en Italie, en Belgique, puis plus loin en utilisant des réseaux. Nous avons donc visité des dizaines d'élevages et découvert quelque deux cents restaurants. C'est ainsi que j'ai habitué mon palais, appris à comparer, à apprécier ou non , appris le plaisir de mâcher et de découvrir le goût, les saveurs de la viande car la viande c'est comme un vin : tout dépend du terroir, de l'élevage, de l'adaptation au paysage, de la façon de la nourrir.
Et alors ?
Alors je me suis rendu compte que la France n'était pas le pays du steak ! mais qu'elle pouvait être dans le top ten avec l'Italie, le Japon, les USA, l'Argentine ou l'Angleterre. J'ai appris à identifier les vrais caractères, à découvrir la multitude de races existantes, leur personnalité, leur adaptation à une terre, les différentes façons de les élever mais aussi que les critères étaient totalement différents d'un pays à l'autre. Sans compter que le goût des consommateurs est innombrable et différent, d'un pays à l'autre mais aussi d'une personne à l'autre. Et la préparation des viandes est très différente.
J'ai aussi appris que, si l'on pouvait très bien se passer de viande, on pouvait aussi l'apprécier en en mangeant que plus rarement mais en sachant la choisir, en essayant de savoir d'où elle venait, comment elle était élevée et tuée, en partant du principe qu'il vaut mieux manger une fois de temps en temps de la bonne qualité plutôt que tous les jours de la mauvaise qualité."

Se poser des questions


"Je crois - nous dit Vérane - que l'on ne se pose pas assez de questions sur la façon de manger de la viande et c'est ce que nous avons voulu faire en réalisant ce que j'appelle un parcours initiatique. Notre priorité était donc de poser les bonnes questions aux éleveurs puis aux bouchers. Et pour les bouchers, c'est ce que doit faire aussi le consommateur afin qu'il le mette devant ses responsabilités. Je dirai même, souvent devant sa fainéantise car la seule valeur c'est le travail. Aujourd'hui on a tendance à oublier la qualité. On va au plus pressé, au moins cher, on oublie qu'une bonne viande c'est une question de temps et de travail. Donc évidemment, le coût est plus élevé. Il vaut mieux manger plus cher et meilleur, quitte en en manger moins."

Travailler avec les locaux


Erick, qui avait réuni ce soir-là tous les producteurs locaux avec qui il travaille, rebondit sur la notion de travail :
" Ces gens qui ont décidé de faire ce qu'il y a de meilleur, doivent travailler plus pour quelquefois gagner moins. Mais ils ont la notion du travail bien fait, de la qualité qu'ils offrent au client.
Si je suis un adepte des circuits courts, moi aussi je vais peut-être gagner moins et travailler plus car tous les jours je me lève pour aller chercher mes produits que je vois naître, pousser, élever. Quelquefois même j'aide au ramassage et c'est un travail de tous les jours. Mais au moins, je sais que ce que je sers à mes clients, c'est le meilleur qu'on puisse avoir. Sans compter qu'on fait en plus travailler des locaux, ce qui est important. Je me fais plaisir, je leur fait plaisir et je fais plaisir à mes clients car dans le fait de manger, il faut qu'il y ait une notion de plaisir. Comme le fait de déguster un bon vin. Mieux vaut en boire un verre de bonne qualité qu'une bouteille de mauvaise qualité."
"Il faut se dire - rajoute Franck - que la viande est un aliment d'exception car c'est un animal vivant qu'on doit élever et tuer dans les meilleures conditions. Si en France, on a les meilleurs bouchers c'est qu'ils ont les pires races à découper !"

Réapprendre à retrouver le goût


"Ceci dit, je crois qu'il faut réapprendre aujourd'hui à bien manger, à retrouver le goût, refaire son palais, repartir de la base parce que, peu à peu, on a tout perdu, faute de temps, faute d'argent, faute aussi de ne pas assez se soucier de la provenance des produits qu'on achète et de la façon dont ils ont été élevés".
Ce film remarquable nous a donc dévoilé les coulisses de deux métiers, éleveur et boucher, pratiqués différemment dans le monde entier et peut-être que cela nous fera réfléchir sur la mal bouffe et surtout sur la façon de regarder maintenant et autrement, un morceau de viande sur un étal, de nous poser les bonnes questions et de les poser à qui de droit avant de la consommer.

J.B., le 04 novembre 2014

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