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Le 3. septembre 2014 à 15h26

Economie Les établissements de plage sont-ils en péril ?

Le Décret plage de 2006 fixant l’utilisation du bord de mer remet en cause de nombreux établissements de plage et des centaines d’emplois. Les professionnels s’organisent pour le faire modifier.

En 2006, le décret plage limitait la part du littoral pouvant être concédée. De 30 % des sites naturels et 70 % des plages artificielles, ces seuils étaient ramenés à 20 % et 50 %, risquant de bouleverser tout un secteur économique. De plus, celui-ci précise que tous les établissements doivent être démontés en fin de saison, afin de rendre au littoral son aspect initial, ce qui conduirait à la démolition de nombreux bâtiments en dur, construits il y a fort longtemps.

Jusqu’à présent, le décret faisait des inquiets, mais n’était pas appliqué… jusqu’à ce que le gouvernement actuel ne décide de « l’activer » à l’aube de l’été 2013.

Plus de 2000 emplois menacés ?


Selon un communiqué de la FNPR (Fédération Nationale des Plages Restaurants), et de l’UMIH (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie), le décret du 26 mai 2006 relatif aux concessions de plage a montré, depuis son entrée en vigueur, les difficultés de sa mise en œuvre, son coût financier important pour les professionnels, et les risques de suppression d’emplois. En effet, selon les calculs de la Fédération Nationale des Plages Restaurants, en l’état actuel, le texte entraînerait par exemple la disparition de 400 emplois pour la ville de Cannes, 400 pour la ville d’Antibes, alors que le schéma d’aménagement de la plage de Pampelonne menace plus de 200 emplois directs (et 4000 emplois indirects). Sur le territoire national, ce sont plus de 2000 emplois directs qui seraient supprimés.
Dans la pratique, il faut malgré tout faire le distinguo entre le Domaine Public Maritime (DPM), directement impacté par le décret et le domaine communal, qui n’est pas concerné. Sur le DPM, l’état concède à la commune, l’utilisation de l’espace, qui, en quelques sortes le sous-loue, en devant respecter le décret.

Six-Fours a anticipé


A Six-Fours, cela fait longtemps que ce décret est dans les têtes et que des actions ont eu lieu. Il a fallu d’abord repérer ce qui était concerné. Il y a eu ensuite, soit destruction soit reconversion des bâtiments en dur. Plage de Bonnegrâce, deux restaurants sont devenus postes de secours, tout comme un autre , plage du Cros, évitant ainsi la destruction. Par contre Plage du Rayolet et Plage des Charmettes, ils ont été tout simplement détruits. Il ne resterait, à l’heure actuelle que la terrasse de la Frégate sur le Domaine Public Maritime, alors que tous les autres sont sur le domaine communal. Mais on ne parle ici que d’une terrasse et pas de bâtiment…
L’autre mesure qui a été prise sur la commune, c’est la réduction des espaces ‘matelas’. Ceux-ci sont passés de 400 à 200 m².

Sanary, c’est fait, mais…


A Sanary, c’est réglé. Le décret a été appliqué à la lettre, mais il ne concernait que deux plages, celle des Roches taillées et celle du Lido. La mairie a proposé de renouveler les concessions uniquement si les bâtisses respectaient les règles, avec montage-démontage. Les deux établissements en dur ont été démolis, mais seul un des deux exploitants a signé en acceptant de démonter et stocker son commerce en fin de saison. Celui de la plage dorée est devenu Plage Naturelle Dorée. Par contre, aux Roches taillées, Le Mantra a disparu mais essaye de faire entendre par voix de justice l’intérêt patrimonial

Vers la disparition d’établissements célèbres?


C’est à ce niveau que les deux organisations professionnelles essayent d’éviter d’autres destructions puisque Le Mantra à Sanary n’est pas un cas unique. Si aucune évolution n'est apportée, la destruction d'établissements célèbres qui font partie du patrimoine culturel et faisant la renommée des communes, tel que ceux situés sur la commune du Cap D'ail (Plage de La Mala), sur la commune de Saint Jean Cap Ferrat (Paloma, Plage de La Scaletta), sur la commune de Vallauris (Tétou, Nounou, etc...), sur la commune de Theoule (Le Marco Polo), vont être purement et simplement détruits. Et, lorsque les établissements sont dans des «espaces remarquables», comme la plupart, plus rien ne pourra être reconstruit après...
Nice se verrait amputée d'une partie de son occupation, le renouvellement des plages de La Croisette prévu dans deux ans si le décret plage est toujours en place, risque de voir la suppression de 5 établissements d'une renommée internationale évidente, et la suppression de 8 établissements à Antibes. Sans parler du schéma d'aménagement de la Plage de Pampelonne, qui détruirait tous les établissements avant les aménagements dunaires et des réinstallations bien plus limitées (4 établissements en moins, superficies et linéaires des nouveaux établissements réduits).

Les professionnels réagissent


Face à ces dangers, les professionnels ont réagi. La FNPR (Fédération Nationale des Plages Restaurants), l’UMIH (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie), et l’ANEL (Association Nationale des Elus du Littoral) ont acté avec Frédéric Cuvillier, secrétaire d’Etat chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche, la mise en place d’un groupe de travail sur la réforme du décret-plage. Une réunion en concertation avec ces différentes organisations professionnelles aura lieu après le 5 septembre 2014.
Jean-Pierre Ghiribelli, Président de l’UMIH précise les souhaits de sa fédération : «  Il faut arriver à une uniformisation des règles, tant pour l’occupation que la durée des concessions. Il faut absolument bannir la règle obligeant les bâtis à être démontés en fin de saison, par un démontage en fin de concession. Il faut conserver tous ces établissements emblématiques qui font l’image de notre tourisme. Certains sont connus dans le monde entier. Ce décret doit tenir compte de l’attrait particulier de la Côte d’Azur. Enfin, en 2006, 20% de l’occupation nous avait été accordés. Avec les nouvelles règles, certaines communes voient se chiffre largement diminué. Des centaines d’emplois sont en jeu. Nous devions réagir ».
Il ajoute : « De plus, ce texte est discriminatoire par rapport aux autres pays européens, comme l’Espagne ou l’Italie par exemple ».

Notre Côte d’Azur est le fleuron d’une économie touristique encore dynamique. Il serait dommage de la mettre en crise, mais tout proche de nous, Six-Fours et Sanary ont bien anticipé !

PH, le 03 septembre 2014

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