Sanary
Attentat terroriste
Sanary figée dans la tristesse et le recueillement
Le Maire de Sanary entouré de son conseil municipal avait convié les Sanaryens à se rassembler sur le parvis de l'Hotel de ville ce jeudi après-midi afin de rendre hommage aux victimes de l'attentat à Charlie Hebdo et d'apporter leur soutien aux familles. La population est venue en nombre se recueillir et manifester son indignation.
Dès 14h30 les Sanaryens venus entre amis, en famille ou seuls ont commencé à se rassembler devant la mairie. Peu de jeunes, ils étaient sans doute en classe ou au travail, mais beaucoup dans l'assemblée arboraient l'affichette qui a fait le tour de la France et des réseaux sociaux « Je suis Charlie ». Dans un silence peu commun le Maire, aux côtés des élus, du commissaire Valérian et du Père José Andrade, a entamé un discours qui rendait particulièrement hommage aux policiers abattus froidement.
Indignation et tristesse
Le ton grave, le Maire exprima son indignation et sa tristesse: « Il n'y a pas de mots assez forts pour qualifier ce qui s'est produit hier. Ce qui me préoccupe aujourd'hui c'est quelles seront les solutions ? Car je crains comme vous que ce ne soit pas le dernier moment de tristesse et d'horreur que nous ayons à traverser dans les temps futurs. C'est évidemment une atteinte à la liberté d'expression de la presse et d'expression tout court. Certaines personnes peuvent se sentir offensées par des mots, des écrits des dessins mais rien ne peut justifier qu'à une offense on réponde par des actes barbares. Ce qui est grave c'est que des hommes aient pu considérer qu'il pouvaient imposer leur justice avec une telle barbarie. Je voudrais que nous ne nous laissions pas emporter par la colère en disant à toutes ces familles notre amitié et notre tristesse partagées.»
Il s'attarda un moment sur le sort des policiers : «ce n'est pas un échange de coups de feu qui a conduit à la mort du policier, c'est une exécution sommaire, c'est un acte de guerre non pas contre la police mais contre notre pays. Il est important de dire aujoud'hui au Président de la république que le peuple de Sanary lui assure toute sa solidarité, et que nous espérons qu'il saura trouver les bonnes réponses que nous attendons. Les actes venant les uns après les autres, nous pouvons considérer que nous sommes en situation de pré-guerre, pour ne pas dire de guerre. Je souhaite que ceux qui ont la charge de ce pays puissent trouver la force et l'intelligence pour arriver à trouver les bonnes solutions. » Et de conclure : « Nous sommes bien tristes pour toutes ces familles, bien tristes pour notre pays »
Le commissaire Valérian prit ensuite la parole : « A titre personnel, j'ai commencé à lire Charlie Hebdo adolescent en cachette de mon père , Cabu et Wolinski écrivaient et dessinaient déjà à cette époque, et si Coluche et Desproges étaient parmi nous aujourd'hui, nous devrions les protéger, la tolérance recule malheureusement. Concernant les forces de sécurité, sachez que toutes les forces sont engagées dans la défense des Français. Je pense à ces trois policiers et à leurs familles » Le pasteur lut ensuite le message de la fédération des protestants de France : « Nous exprimons notre révolte et condamnons cet acte odieux qui touche nos cœurs et nos consciences » Le père José Andrade prit enfin la parole, il remercia tous les chrétiens ayant prié pour les victimes et les familles et pour notre pays. Il proposa à tous de se rendre dans l'église de Sanary pour essayer de « bâtir une civilisation ou règne la paix, l'amour, la compréhension et la communion. »
Après ces brèves allocutions empreintes d'émotion, les cloches de l'église sonnèrent le glas pendant que l'assemblée figée se recueillait de longues minutes dans un silence de plomb.
Paroles de Sanaryens
Un couple arborant « Je suis Charlie » : « J'ai commencé par lire Hara-kiri puis Charlie Hebdo, mes enfants ont grandi avec Cabu. Je suis venue avec mon fils kinésithérapeute qui a aujourd'hui baissé son rideau, mon autre fils était hier place de la République à Paris. Il fallait que nous nous manifestions. Je resterai lectrice de Charlie Hebdo, il faut que ce journal continue ! »
Un couple et ses deux enfants de 21 et 25 ans : « Le discours du Maire a été concis et efficient, il est revenu sur les fondamentaux oubliés et a proposé d'aller vers une réflexion quant aux solutions possibles.» Pour les deux jeunes gens visiblement très impliqués peu d'espoir quant à trouver des solutions : « Nous sommes de la mauvaise génération et nous payons les conséquences du laxisme des gouvernements. On a banalisé des délits et des crimes qui auraient dû être punis, car en France on a peur de parler de répression et maintenant il est difficile de faire marche arrière. Les jeunes baissent les bras ou bien ils veulent fuir le pays. Il n'y a pas de solution ! »
Une retraitée : « J'attendais un vibrant plaidoyer pour la défense des valeurs de la république: liberté, égalité, fraternité. Je suis un peu déçue que la liberté de la presse n' ait pas été plus longuement évoquée alors que quatre journalistes et grands artistes viennent d'être assassinés par des tueurs fanatiques, simplement en raison de leur liberté d'esprit, leur talent et leur humour! Robert Badinter a dit à la radio quelque chose qui m'a interpellée, il nous met en garde et dit qu'il ne faut pas tomber à pieds joints dans le piège tendu par ces tueurs dégénérés: faire régner en France la haine et la division afin de prendre le pouvoir!