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Le 4. février 2013 à 19h42

Le Brusc Patrimoine Les pointus en danger?

L'association de sauvegarde des pointus Lou Capian a tenu son assemblée générale samedi. Le président a fait état de son inquiétude sur le devenir de ce patrimoine. Des échanges très intéressants se sont ensuite déroulés entre les adhérents et le 1er adjoint.

Assemblée générale de Lou Capian.

Assemblée générale de Lou Capian.

Pas de doute Lou Capian est une association à part, qui réunit des passionnés, des amoureux de ce patrimoine et qui en connait un rayon... Mais l'assemblée générale a permis de mieux saisir la complexité de ce patrimoine, des contraintes, des incompréhensions... Les échanges ont été vifs mais courtois, même si les adhérents ont fait valoir un sentiment d'impuissance et de dépossession de leur espace de vie qu'est cette lagune. Car le plus gros sujet de cette assemblée porta sur la lagune, et les adhérents comprirent rapidement qu'ils ne verraient ni demain, ni l'année prochaine, et certainement jamais les pontons qui pourraient leur permettre l'accès à leurs pointus dans la lagune. Jo Fornassari fit aussi allusion à l'année écoulée: "on a réduit nos activités car beaucoup de sociétaires étaient découragés, on a voulu marquer le coup, mais on va reprendre les activités cette année". Malgré quelques péripéties, il se montra satisfait du nouveau local quai de la Prud'homie qui sera inauguré au printemps. Il souligna aussi les liens étroits avec le CLAB, dont son président Didier Castillo était présent samedi. Il regretta enfin la disparition de l'ADILPB, tout en soulignant comprendre "Vincent Georges qui a plus que beaucoup donné", et il eut aussi une pensée pour Pierre Suffren hospitalisé, nouvelle annoncée par le secrétaire Gilles Farrugia.

La lagune, les pontons et les discussions


Petit retour en arrière sur l'AOT
Il faudrait certainement un livre entier pour raconter l'histoire de cette lagune, autrefois pleine de vie, de pêcheurs, puis détériorée au fil des années à cause d'une affluence croissante d'embarcations et de certains comportements répréhensibles. Un jour l'Etat décida de faire valoir son droit de police, et dans cet espace classé "zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique", tous les bateaux durent quitter le lieu. Mais à la première demande d'Autorisation d'Occupation Temporaire (AOT), la commune s'engagea à réduire les embarcations "jusqu'à extinction" comme l'expliqua le premier adjoint Joseph Mulé. Il souligna que les impératifs et la réglementation stricte de la lagune n'étaient ainsi pas liés à Natura 2000 comme on pourrait le croire: "c'est justement grâce à Natura 2000 qu'on a pu faire valoir qu'il fallait que les pointus restent dans ce site", chose garantie pour cette AOT actuelle.
Les pontons en question
Pourtant, entre temps, les amoureux des pointus ont vu leurs pontons en bois disparaître, Jo Fornassari s'accordant à dire que l'idée des pontons flottants ne semblait guère propice au site et qu'il fallait à tout prix réfléchir à d'autres solutions: "quand il fait mauvais temps on aimerait pouvoir intervenir, on a besoin d'un accès". Des adhérents exprimèrent l'incohérence de cette interdiction de mise en place de pontons: "on est obligé de piétiner, donc la faune est forcément touchée, cela n'a aucun sens, il faut trouver une solution mais à qui s'adresser?".
Le premier adjoint rappela que la municipalité gérait ce site dans le cadre de l'AOT, mais que seul l'Etat était "propriétaire" du site. Il précisa: "il y a eu un bureau d'études qui a effectué son travail avec les impératifs des services de l'Etat. Et je peux vous dire que si vous posez la question au préfet sur les pontons, vous risquerez plutôt d'entendre que tous les bateaux doivent quitter le site". Frédéric Agostinetti (administrateur) prit la parole: "quand j'étais jeune il y avait toujours les anciens sur les pontons, ce sont eux qui m'ont transmis la passion de ce patrimoine, à qui va-t-on transmettre cela aujourd'hui? Il faut bien prendre conscience que ce patrimoine se meurt, et ne pas avoir honte de prendre des décisions favorisant les pointus. N'oubliez jamais que tous les ports de la côte ont été mis en place par des pêcheurs. Regardez à Sanary, c'est la municipalité qui a fait appel aux pointus pour mettre en valeur le port, car ils ont compris ce que cela pouvait apporter au tourisme".
Et Jean-Louis Conil (fondation du patrimoine maritime et fluvial) de prendre la parole: "c'est un manque de bon sens que d'imaginer autre chose que des pieux plantés. Natura 2000 a fait valoir les pointus comme une carte postale. Mais il ne faut pas oublier que c'est un outil de travail, source de vie. Actuellement je vois qu'on accepte de tuer toute vie humaine sur ce site. C'est une tradition, un mode de vie, l'association mène un combat légitime, intelligent". Applaudissements.
Quelle perspective sur cette lagune?
Puis le trésorier Didier Sophin s'interrogea sur le devenir de cette lagune: "on a bien compris qu'à terme vous ne vouliez que des pointus?". Réponse par l'affirmative du premier adjoint, Jo Fornassari ponctuant: "que ce soit clair, les bateaux en plastique ne nous gênent pas, on n'est pas à l'origine de cette demande, même si cette décision nous est favorable". Il pourrait y avoir une double tarification appliquée pour inciter les bateaux en plastique à partir, sachant que la condition sine qua non pour être dans cette lagune était d'être inscrit sur la liste d'attente du port.
Le débat se termina avec simplicité, Jo Fornassari s'adressant au premier adjoint: "je sais que votre titre ne vous permet pas d'exprimer votre opinion, mais il faut vraiment que vous compreniez notre désarroi". Le premier adjoint en convint, tentant de faire saisir la complexité de la situation et précisant que ce n'était pas un "manque de volonté": "la commune n'est pas décisionnaire, le fait que ce soit une zone naturelle classée rend encore plus compliqué tout aménagement, ce serait déjà plus simple si on parlait d'enceinte portuaire, mais même si c'était le cas, je peux vous dire que faire avancer des projets est terriblement difficile".

L'aire de carénage et l'APPB


Ce n'était pas la bataille des bateaux en bois face aux bateaux en plastique, mais Jo Fornassari revint sur l'épisode houleux de l'aire de carénage regrettant que cette histoire soit sortie d'un coup, sans en avoir été informé, alors qu'il semble que "le président de l'APPB était déjà au courant depuis un certain temps". Dans la salle, des membres de l'APPB réfutèrent catégoriquement cela. Le premier adjoint confirma le propos du président, rappelant que lors de l'assemblée générale de l'APPB en 2011 il avait "déjà soulevé le problème, qui germait depuis un certains temps. C'est malheureux que le concessionnaire soit parti, mais on ne va pas revenir sur le passé". Le président de Lou Capian fit une demande "officielle": "peut-on disposer d'une partie de l'aire de carénage de l'APPB pour que l'on puisse sortir nos bateaux, et ce, sans être obligés d'adhérer à l'APPB?". Réponse par la négative du premier adjoint qui rappela que "la base nautique était sous la coupe de Ports Toulon Provence, et qu'une convention liait actuellement la commune avec l'APPB: "compte tenu des responsabilités, le maire ne peut avoir qu'un seul interlocuteur, aujourd'hui c'est l'APPB mais rien n'est gravé dans le marbre".
Puis, lorsqu'il fut question du projet d'une grue mobile gérée par la capitainerie, le président expliqua: "comprenez que nos besoins ne sont pas les mêmes que ceux des bateaux en plastique. On a besoin de temps pour entretenir nos bateaux, pouvoir les mettre à l'eau quand on le veut; on a un tas de contraintes, et devoir prendre rendez-vous, être limité dans le temps rendent les choses compliquées". Allusion fut faite à la disparition de la grue fixe, mais encore une fois, Lou Capian n'eut pas de quoi espérer grand chose. Frédéric Agostinetti tirant le signal d'alarme: "aujourd'hui on ne fabrique plus des pointus, c'est un patrimoine qui est menacé de disparaître. On ne peut que les restaurer, les remettre en état. Il faut inciter les gens à acquérir des pointus sinon ils termineront brûlés, tout le monde sait qu'on ne peut garder des mois un pointu à terre, ce n'est pas comme un bateau en plastique. Donc pour cela il faut des mesures pour favoriser les propriétaires des pointus, leur mettre des outils à disposition pour les entretenir. Il faut surtout ne pas mettre en péril ce patrimoine et favoriser la transmission".

Programme de Lou Capian


1er juin: journée pointus et handicap, 23 juin fête de la bouillabaisse, 6 juillet: grande fête des pointus de Lou Capian, 14 juillet: pique nique nocturne, 21 juillet: fête de la Saint Pierre, novembre: repas fin de saison, participation au Téléthon, décembre: arrivée du Père Noël en pointu. Il y aura des embarcations immédiates en fonction des manifestations commerciales.

D.D, le 04 février 2013

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Autres photos:

Prise de parole de J-L Conil.
Prise de parole de J-L Conil.