Lou Capian se bat pour la sauvegarde des pointus du Brusc et les jeunes de l'association tiennent plus que tout à préserver "leur village". Aujourd'hui, même si le pointu "revient à la mode", rien n'indique qu'il ne disparaîtra pas un jour de nos ports. Il n'existe plus d'entreprise de construction de pointus; certaines les restaurent mais en général un propriétaire de pointu qui décède voit son embarcation mourir avec lui. En parallèle se développe un commerce où certains pointus se vendent à prix d'or: "il ne faut pas qu'il y ait de cote pour les pointus" nous dira Frédéric Agostinetti. Comprenez qu'il ne s'agit pas d'une marchandise, et que dans l'esprit des puristes, un pointu se garde toute sa vie puis se transmet à ses enfants. Mais sans l'affirmation d'une politique spécifique aux pointus, avec la possibilité par exemple de transmettre sa barque avec la place de port à sa descendance, les pointus vont progressivement disparaître du paysage. Le tableau n'est pas complètement noir, des points positifs existent, comme le renouvellement souhaité par la municipalité de l'AOT dans la lagune du Brusc, qui n'abriterait que des pointus répondant à une charte (sur l'entretien, l'environnement...) ou le parcours "historique" avec l'emplacement prochain de panneaux explicatifs sur l'histoire des pointus du Gaou disposés tout au long de la Corniche des îles.

Pas touche à la grue

Cependant, l'espace des pêcheurs a été diminué sur le quai Saint Pierre pour laisser place aux terrasses des bars-restaurants. Et certaines mesures envisagées sont sources d'inquiétude: cet hiver les pêcheurs furent conviés à une réunion d'information sur les travaux d'aménagement du port et le déplacement de l'aire de carénage y fut évoqué. Frédéric Agostinetti s'oppose à cette idée: "il s'agit d'un lieu d'échange, de transmission de notre patrimoine où les jeunes côtoient les anciens. Cette place embellit l'endroit en mettant en valeur le port de pêche, car il ne faut pas oublier qu'il s'agissait avant d'un port tourné exclusivement vers la pêche. Mais bien sûr on pourrait rendre cet espace plus attrayant". Il insista aussi sur ce point: "il ne faut pas oublier l'utilité de cette grue pour les pointus, qui peuvent rester d'un jour à un mois sur cette aire. On ne peut pas utiliser l'image des pointus en nous enlevant nos moyens d'entretien". D'ailleurs cette idée d'enlèvement de la grue renvoie à une autre époque, où des bruscains menés par Robert Canolle s'étaient battus contre le projet de l'ancienne municipalité de faire disparaître cette grue. Cet endroit renvoie à l'âme du Brusc, au travail de ces pêcheurs qui utilisaient cette grue, et aujourd'hui, malgré son vieil âge, elle continue de rendre un fier service aux propriétaires de pointus. Il n'est pas rare d'y retrouver les anciens discuter, les jeunes se rencontrer. Sauvegarder le pointu revient finalement à une volonté de protéger notre patrimoine local, tout comme ceux qui perpétuent le jeu provençal ou qui transmettent les us et coutumes d'antan.

Les pointus dans la lagune du Brusc