Laurent Lévy à gauche, le journaliste Franz-Olivier Giesbert au centre et le philosophe Michel Onfray à droite.
Immense succès populaire
Pour son troisième Entretien de l'été, Jérôme Lévy de Sud à la carte avait vu les choses en grand en invitant deux intellectuels très médiatiques. Bien lui en a pris car, même en villégiature au bord de la mer, le public était au rendez-vous. Ils étaient en effet plus de 700 vendredi soir quai de la Prud'homie. L'adjointe au quartier du Brusc Delphine Quin n'en revenait pas : « Les chaises que j'avais réservées ont été prises d'assaut. Pour une première au Brusc, c'est impressionnant. L'affiche est belle, mais quand même ! »
La sécurité, déjà renforcée en cette période estivale post-attentats, avait été montée d'un cran. Le Commissaire Gilles Vallérian a parlé de « grosse mobilisation des forces de l'ordre », avec policiers municipaux en gilets pare-balles et passages réguliers de la police nationale qui surveillait également l'hommage à Joe Coker au Parc de la Méditerranée et le concert de I Muvrini à Bandol.
« J'en ai assez des peluches ! »
Lors du premier Entretien de l'été, Patrick Poivre d'Arvor avait choisi d'alterner poèmes et passages musicaux de la violoncelliste Caroline Glory
(voir notre article). Tout comme Jean-François Kahn lors du deuxième Entretien, Franz-Olivier Giesbert et Michel Onfray ont préféré s'attaquer à l'actualité de front. Si PPDA avait évoqué les victimes de l'attentat de Nice avec un poème d'Aragon, le philosophe a réfuté d'entrée cette approche du terrorisme : « Je n'aime pas le traitement empathique. Un philosophe ne peut pas se contenter de bougies et de poèmes, fussent-ils d'Aragon. La compassion est le degré zéro de la réflexion. »
La France est-elle coupable ?
Franz-Olivier Giesbert et Michel Onfray ont longuement débattu des causes nationales et internationales du terrorisme et de la marche à suivre pour le combattre. L'ancien directeur du Point, fils d'Américain et né lui-même aux Etats-Unis, a dit aimer ce pays plus que la plupart des présents justement parce qu'immigré de fraîche date : « Il y a une absence totale d'amour en France, personne n'est fier d'être Français. Il faut aimer la France. »
Onfray a lui incité la France à faire son autocritique. « Si l'on a causé 4 millions de morts depuis 1991, cela génère des réponses », a-t-il dit en faisant référence à l'oummat, la communauté des musulmans impliquant leur empathie les uns pour les autres. « Nous récoltons nationalement nos choix internationaux. »
La pierre d'achoppement entre les deux intellectuels a porté principalement sur l'islam, Giesbert étant de l'avis que l'islam est pris en otage par Daesh :« On n'a pas traité la communauté musulmane en laissant le salafisme se développer. Il y a un affaissement et une démission devant les minorités. Il faut montrer notre force et arrêter Daesh avant qu'ils élargissent leur territoire vital en faisant tomber l'Egypte, la Tunisie, l'Algérie, le Maroc... »
« Arrêtons de défendre l'indéfendable »
Onfray a lui estimé qu'il se trouve dans chaque religion « matière au meilleur ou au pire ». Les chrétiens, par exemple, ont beau jeu maintenant de se dissocier de l'Inquisition. Ceux qu'il insiste à appeler « Etat islamique » (« Il a un territoire, un drapeau, il lève des impôts ») s'appuient sur une partie du Coran. « Ce sont ces passages que suivent aveuglément des gamins paumés qui ne savent ni lire ni écrire », faute qu'il attribue aux « professeurs soixante-huitards qui pensent que la France n'est QUE pétainisme et colonialisme ».
La discussion à bâtons rompus entre les deux intellectuels a été franche et sans langue de bois. Libre à chacun des présents de se faire sa propre opinion à la lumière des arguments exprimés. Pour clore la soirée, Gilles Grandguillotte, le directeur d'exploitation des îles de la famille Ricard, a offert aux intervenants deux bouteilles de Côte de Provence des Embiez. « Franz-Olivier Giesbert était un ami de Patrick Ricard et venait régulièrement », a expliqué Gilles Grandguillotte.
Les intervenants ont ensuite dédicacé leurs livres « Penser l'Islam », « Cosmos » de Michel Onfray et le roman « L'arracheuse de dents » de Franz-Olivier Giesbert. Une chose est sûre pour Didier Castillo, président du Comité de Liaison des Associations Bruscaines et partenaire du festival, au vu de leur succès cette année, les Entretiens de l'été auront bien lieu l'année prochaine !