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Le 19. novembre 2009

Le Brusc Culture A l’heure où le Brusc se transforme, retour sur son histoire et ses spécificités

Le Brusc vit de nombreux aménagements ces derniers temps : le port, la capitainerie, la corniche des îles, les Houillères de Lorraine. C’est l’occasion pour Six-Fours.net de se replonger dans l’histoire et les spécificités de ce village.

Le port du Brusc en 1920

Le port du Brusc en 1920

Le Brusc d’avant et d’après-guerre


Avant-guerre, l’indépendance du Brusc est évoquée lors du conseil municipal de Six-Fours, mais « le village » n’ayant pas de cimetière, le projet sera abandonné. Il paraîtrait que lors de l’inauguration du cimetière de Courrens, un homme dans la foule s’écria, « maintenant vous l’avez votre cimetière ».

Durant la seconde guerre mondiale, Le Brusc fut occupé par les Italiens puis les Allemands, et sera bombardé en juin 1944, détruisant de nombreux bâtiments, ce qui lui vaudra une reconstruction hâtive et quelques aberrations…

En 1946, la marine s’installe au Brusc avec le Centre d’Etudes de la Marine qui procède à des mesures d’acoustique sous-marine. Près de 200 personnes y travaillaient. (Étude des transducteurs et des systèmes sonars, mesure des bruits…).

En 1958, Paul Ricard achète l’île des Embiez. L’île abandonne sa vocation millénaire d’exploitation du sel et va se transformer en port d’accostage et de mouillage. Les travaux prennent fin en 1963.

Dans les années d’après-guerre, le Brusc reste un village de pêcheurs, Gérard Loridon dans « le scaphandrier du Brusc » le décrit de la sorte, « La première fois que je m’y suis rendue c’était un village et un port de pêche comme il y en avait en Provence… sur le quai étaient amarrées des barques de pêcheurs et, en moins grand nombre, les bateaux modestes de quelques plaisanciers… ». Comme nous le raconte Léon Dodéro, premier prud’homme durant 24 ans au Brusc, le Brusc comptait 48 patrons pécheurs, avec en moyenne 2 matelots par bateaux. D’ailleurs, le père de Jean-Marc Chrestian, patron du bar Le Piadon, faisait partie de ces pêcheurs, avant qu’il n’ouvre cette fameuse boutique d’article de pêche « que les plaisanciers du Brusc et les ouvriers de la Coudoulière fréquentaient beaucoup ». Car à l’époque Pierre et Vacances n’existait pas, l’endroit était occupé par l'usine de Tuileries Romain Boyer. Des centaines d’ouvriers y travaillaient. Dans le film « le Brusc… d’hier à aujourd’hui », Alain Pellerano, bruscain et ancien professeur des collèges, décrit ce café comme « un des rares commerces orientés plein sud avec une ambiance sereine et agréable… le Piadon est le dernier café qui conserve encore une âme ». Et oui il fut une époque où le Brusc n’était qu’un port de pêche, où les vieilles familles du Brusc cultivaient leurs potagers, où les flamants roses arpentaient la lagune. Le Grand Hôtel se dressait sur le port, « l’épicerie maritime » proposait les légumes du pays, la route ne reliait pas encore le Brusc à Sanary, un autre temps, où les anciens ne manquent pas d’anecdotes, avec les fêtes au Cabaret et les rencontres avec les jeunes filles de « la Brise des Pins »…

Les années 90 et la naissance du CLAB


André Mercheyer, soucieux de faire vivre « le village » crée le CLAB en 1991 (Comité de Liaison des Associations Bruscaines) dans un esprit d’autogestion, et avec la volonté d’organiser un calendrier culturel et sportif pour le village. « Dédé Mercheyer et les siens entendent bien conserver une âme à ce quartier de Six-Fours. Un quartier ? L’homme se récrier : Non ce n’est pas un quartier. Il ne nous viendrait pas à l’idée de dire que l’on habite à Six-Fours. Nous habitons Le Brusc, c’est un village à part entière… Le CLAB a vu le jour pour fédérer les clubs sportifs, les clubs culturels, les groupements de commerçants et les pécheurs. » (Var Matin du 2 décembre 91)

C’est à Robert Canolle et à l’action du CLAB, que le Brusc doit sa fameuse fête de la bouillabaisse : « Chaque association disposait d’un stand de dégustation. Nous avions organisé une fête vénitienne avec des pointus décorés, illuminés. Chaque association proposait deux activités gratuites. Les enfants de l’école avaient confectionné une rascasse géante », se remémore-t-il. Quelques1500 bouillabaisses furent cuisinées. Un succès incroyable, et chaque année apporta son lot de souvenirs. André Mercheyer se souvient de celle de 1996 où il avait écrit un hymne, distribué à tous les participants, et qu’il chanta sur le podium avec le maire : « Par amour pour leur village, Les Bruscains sont réunis, Mêm’ s’ils sont un peu sauvages, Ce sont des gens du midi. Bouillabaisse, Bout et baisse, Ton caractère, c’est celui des gens d’ici, Un coup de gueule, et puis un bon pastis! … »

Le Lamparo entend
« éclairer les esprits des Bruscains »


Une équipe restreinte d’amoureux du Brusc vont se lancer dans l’aventure du « Lamparo ». Ce journal mensuel du CLAB, né de l’imagination d’André Mercheyer avec « sa bande de copains » entendra « éclairer les esprits du Brusc ». André Marmigère était le directeur de publication, André Mercheyer chapeautait l’équipe, qui sera composée de plumes diverses, telle que Robert Canolle, Dominique Duhamel, Micheline Tillier, Remy Feraud ou encore Gérard Loridon. Distribuée gratuitement à 3000 exemplaires, et financée grâce aux encarts publicitaires des commerces Bruscains, cette publication entendait affirmer l’identité du Brusc. Les titres des articles sont assez évocateurs pour saisir l’esprit de la revue : « comment ça…pas un village », « le Brusc, un village né de la posidonie ». À l’époque les Bruscains se sentaient exclus de Six-Fours, l’opposition Reynier-le Brusc se matérialisait par un panneau départemental où Six-Fours était barré à l’entrée du Brusc. Les déclarations vont bon train, le 2 février 1992, André Mercheyer explique dans Var Matin : « Nous savons tous que le Brusc, sans vouloir rompre avec la ville de Six-Fours, car nous n’avons pas de vues sécessionnistes, constitue un village à part, une entité à forte personnalité et à la mentalité particulière. Ses habitants refusent de le considérer comme un simple quartier ».

Lorsque la municipalité de l’époque dirigée par Mr. Estève menace d’enlever la grue des pêcheurs, Robert Canolle président du comité d’intérêt local et les pêcheurs vont hardiment s’y opposer, expliquant la nécessité de cet outil et l’intérêt de la réparer. Opération réussie. Robert Canolle nous confie que cette grue fait partie du monde du travail, qu’il est heureux que des gens se retrouvent pour discuter dans des endroits comme ça. Il est irrité lorsqu’il entend aujourd’hui que des commerçants se plaignent de la nuisance de la grue. « À croire, qu’il faudrait éloigner les zones de travail des gens, comme aux Playes », et faire disparaître ces lieux de convivialité pour les remplacer par des espaces de rencontre artificiels. Pour l’anecdote, à cette époque Joseph Mulé était président de l’Association de Défense des Quartiers du Brusc, et entendait s’opposer à certains projets immobiliers de la municipalité qui menaçaient des quartiers du Brusc. C’est à ce moment-là qu’il rencontra Jean-Sébastien Vialatte.

Le Brusc aujourd'hui


Aujourd’hui avec 4 pêcheurs à l’année, considérer le Brusc comme un port de pêche n’a plus vraiment de sens. La plaisance est désormais majoritaire, tandis que les pointus, rassemblés dans la lagune, témoignent d’un temps, qui s’apparente de plus en plus à une vielle histoire. Les hôtels ont disparu, les filets de pêche également, la corniche des îles va se transformer et devenir progressivement un lieu de promenade encore plus fréquenté. Comme sur le reste de la côte, il faut désormais protéger les espaces sauvages, au risque de transformer en musée des lieux qui évoquaient la liberté.

Le CLAB existe toujours, il a été repris par Didier Castillo et participe activement à la vie du village. Désormais il bénéficie du soutien financier de la municipalité. Bien évidemment des associations « historiques » continuent à faire vivre « l’âme bruscaine », nous citerons Lou Peilou présidée par Albert Laure, « Lou Capian » avec Jo Fornasari, ou encore « Entre Bouasque e Bronde », une jeune association d’amoureux du Brusc. Le Brusc vit aussi avec le jeu provençal, défendu ardemment par la Boule Joyeuse des îles présidé par Bruno Golé, dont le siège sociale n’est autre que Le Rivage. Le Piadon garde cette saveur provençale inimitable, où le temps s’arrête, l’espace d’un café.

Le Brusc pourra t’il garder
sa spécificité dans l’avenir ?


L’aménagement du port et la nouvelle capitainerie devrait offrir en 2010 un visage plus accueillant pour les plaisanciers.

En mars 2010 les aménagements de la Corniche des Îles permettront aux promeneurs de bénéficier d’un espace plus large, et de limiter la circulation des voitures.

Dans la lagune du Brusc, l’autorisation d’occupation temporaire devrait être renouvelée, à terme il est probable que seul les pointus puissent y rester.

Le Mail devrait aussi changer de visage avec un embellissement des espaces et un projet de parking.

Enfin, sur le long terme la municipalité envisage de reconvertir le Centre d’Etudes de la Marine en complexe hôtelier, avec à la clef une école de formation hôtelière.

N. B : Nous remercions André Mercheyer pour le prêt de nombreux documents et des photos du Brusc ancien reproduites ci-dessous.

Traste, le 19 novembre 2009

Autres photos:

Jean-Marc Chrestian, le patron du Piadon. André Mercheyer est à l’origine du Clab et du Lamparo.
Jean-Marc Chrestian, le patron du Piadon.